ACOUPHÈNES : Pas de repos pour le cerveau !
Souffrir d’accouphènes oblige le cerveau plus à l'attention et lui laisse moins de repos, révèle cette étude de l’Université de l'Illinois à Urbana-Champaign qui identifie des différences dans certaines zones du cerveau chez les patients atteints. Ces travaux présentés dans la revue NeuroImage apportent aux patients une validation de leur expérience personnelle, une métrique objective des acouphènes mais aussi l'espoir de nouveaux traitements.
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Les acouphènes sont un trouble auditif courant caractérisé par un bourdonnement continu dans les oreilles, qui peut être très handicapant, échappe à la compréhension scientifique et n’a donc pas de traitement. On estime qu'1 Français sur 4 pourrait être touché par les acouphènes, qu'1 personne sur 2 a déjà fait l'expérience des acouphènes et qu'1 personne sur 2 connaît quelqu'un qui souffre d'acouphènes. Pourtant, 51% des personnes atteintes n'ont jamais consulté. Un grand nombre de causes a été évoqué, des lésions aux cellules ou aux cils de l'oreille interne en particulier, qui peuvent entrainer un signal électrique erroné à travers le nerf auditif que le cerveau interprètera comme un son. Dans d'autres cas, les acouphènes sont liés à la perte d'audition liée à l'âge ou presbyacousie, à l'exposition à des niveaux de bruit (ou de musique) élevés, à une accumulation de cérumen ou à une otospongiose de l'oreille moyenne. L'acouphène reste néanmoins en grande partie un mystère, et ses traitements ou thérapies, comme la thérapie acoustique d'habituation, ne sont pas toujours efficaces.
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L'acouphène est invisible : il ne peut être mesuré par aucun dispositif ou diagnostic, comme peuvent l’être la plupart des maladies ou conditions, comme le diabète ou l'hypertension, remarque l’auteur principal, le Dr Fatima Husain, professeur de sciences de la parole et de l'ouïe à l'Université de l'Illinois. « Les patients peuvent souffrir de ce son constant dans leur tête, mais personne d'autre ne peut l'entendre et les acouphènes peuvent être attribués à l’imagination. Cliniquement, nous ne savons gérer que certains symptômes, ceux que nous pouvons évaluer et expliquer ».
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L’acouphène est variable : sa durée, sa cause, sa sévérité, la perte associée, le type de bourdonnement ou son, sont différents selon chaque patient et chaque patient est différent, avec un âge, une oreille et une histoire spécifiques. Mais cette variabilité extrême fait de cette découverte, « une métrique objective pour l'acouphène », une conclusion « très excitante », commentent les auteurs de l’étude.
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Ainsi, l’acouphène devient identifiable via l’analyse de la connectivité cérébrale : en utilisant l'IRM fonctionnelle (IRMf) pour rechercher des modèles caractéristiques de fonction et/ou de structure du cerveau, la recherche révèle que l'acouphène « prend sa source » dans une zone du cerveau bien précise, le précuneus, situé sur la face interne du lobe pariétal du cortex cérébral. Or le précuneus est relié à 2 réseaux inversement liés au cerveau :
- le réseau d'attention dorsal (dorsal attention network : DAN) qui est actif lorsque le sujet porte son attention sur un objet;
- le réseau du mode par défaut (default mode network : DMN), qui effectue les fonctions « d’arrière-plan » du cerveau lorsque le sujet est au repos et ne pense à rien en particulier.
- Ces 2 réseaux sont inversement liés au cerveau, c’est-à -dire que lorsque le réseau du mode par défaut est activé, le réseau d'attention dorsal est éteint, et vice versa. Or, chez les patients atteints d’acouphènes, le précuneus semble modifier cette relation entre les 2 réseaux : le précuneus est en effet plus fortement connecté au réseau d'attention dorsal et moins connecté au réseau de mode par défaut. Et, plus la sévérité de l'acouphène est élevée, plus ces effets observés sur ces réseaux neurononaux sont augmentés.
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Quelles implications ?
- En premier lieu, les acouphènes deviennent détectables et mesurables, même si l’examen d’imagerie reste complexe.
- Ensuite, c’est pour les patients, une confirmation scientifique de leur vécu, les acouphènes nuisent au repos de l’esprit. De nombreux patients ressentent cette difficulté à se sentir « au repos », même lorsqu'ils se reposent. Beaucoup déclarent être fatigués plus souvent. En outre, leur attention se trouve engagée plus que nécessaire, ce qui peut entraîner des troubles de la concentration.
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L’acouphène « fait » le précunéus ou le précunéus « fait » l’acouphène ? La recherche montre que les patients atteints d'acouphènes à déclenchement récent ne présentent pas ces différences dans la connectivité au précuneus. Leurs scans ressemblent à ceux de témoins sains, ce qui suggère que ces changements dans la connectivité cérébrale se développent avec les acouphènes. Cela pose la question de savoir si, en cas de prise en charge précoce, ils pourraient être empêchés ou diminués. L’équipe envisage donc de mener une étude longitudinale pour suivre les patients ayant développé récemment des acouphènes et pour suivre l’évolution de la connectivité des réseaux avec le précunéus.
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Ces travaux qui apportent une métrique objective corrélée à la durée et la sévérité des acouphènes, contribuent déjà à une meilleure reconnaissance de cette condition et de ses symptômes handicapants et ouvrent la voie à de nouvelle thérapies qui pourraient cibler le précunéus. Â
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