ALCOOL: Une durée de travail prolongée favorise les excès
Les effets sur la santé des heures supplémentaires ou des durées de travail prolongées comme dans le travail posté sont de mieux en mieux documentés. C’est le cas des risques métaboliques, de troubles du sommeil et de certains cancers. Cette large méta-analyse, présentée dans le British Medical Journal en documente un autre : L’association positive et dose-dépendante entre de trop longues heures de travail et la consommation d’alcool. Un appel aussi aux décideurs politiques de réglementer plus rigoureusement la durée du travail recommandée à un maximum de 48 heures par la directive sur le temps de travail de l'Union européenne.
Il s'agit d'une méta-analyse internationale menée à l'Université d'Helsinki combinant des études publiées soit 34 études transversales et 2 études longitudinales, portant au total sur plus de 140.000 participants et des études non publiées, soit 27 transversales et 18 longitudinales, portant, au total sur près de 300.000 participants.
L'analyse combinée de toutes ces données aboutit à l'association entre la durée excessive du travail et un risque accru de consommation excessive d'alcool.
Ainsi, travailler plus de 49 heures par semaine, vs 35-40 heures, est associé
· à une prévalence de la consommation d'alcool supérieure de 11% (études publiées et non publiées),
· à une incidence de la consommation d'alcool (début ou risque d'apparition) supérieur de 12%,
· à un risque accru de 12 à 13% d'une consommation excessive d'alcool, soit > 14 verres / semaine chez les femmes et à 21 verres / semaine chez les hommes.
Aucune différence significative dans ces associations n'est constatée entre les hommes et les femmes ou en fonction de l'âge ou du niveau socio-économiques. Ce qui suggère une indépendance du facteur « durée de travail » sur la consommation d'alcool.
Cette méta-analyse confirme ainsi une idée de longue date : L'alcool est à la fois consommé comme un agent rapidement apaisant des stress et fatigues de la journée et comme un facilitateur de transition travail et vie personnelle.
Mais quelle définition de la durée de travail ? Un article de commentaire, publié dans la même édition, précise qu'il serait trop simple de s'en tenir à la seule durée hebdomadaire du travail. Les auteurs précisent que,
- nombre d'études menées en Australie, en Europe, au Japon et en Amérique du Nord, classent des emplois cadres de manière disproportionnée comme exposés à cette durée de travail exagérée et, en revanche, néglige de prendre en compte de nombreux emplois dont le temps consacré au travail devrait intégrer de longues durées de trajets. Cette imprécision méthodologique entraine, écrivent les auteurs, une surreprésentation des travailleurs plus privilégiés.
- Il existe des effets néfastes physiologiques associés à l'augmentation des heures de travail sur une journée de la semaine même si le travailleur reste globalement en deçà de la limite hebdomadaire des 48 heures. Travailler 12 heures par jour pendant 4 jours consécutifs augmente aussi le risque de troubles métaboliques et autres, et de blessures de 25% pour le travail posté de jour, de 55% pour le travail posté de nuit.
- Enfin, il faut souligner les risques associés aux horaires décalés ou simplement au manque de stabilité des horaires hebdomadaires. Des études montrent que les consommateurs d'alcool changent d'emplois ou perdent leur emploi plus souvent et sont donc plus souvent soumis à ces changements d'horaires. ...
Où doit-on placer le curseur ? Là est la question, alors que la durée excessive de travail est facteur indépendant de risque de consommation excessive, mais que le travail est associé à une prévalence plus faible de problèmes d'alcool et à une plus grande chance de se rétablir d'une dépendance à l'alcool, par rapport à ne pas travailler. Ainsi, la perte d'emploi et le chômage sont des causes bien établies des problèmes avec l'alcool.
La réponse est peut-être dans une prise en compte globale des effets sur la santé, mentale et physique, ‘une durée excessive de travail, d'horaires décalés et/ou du travail posté. En comparaison de l'augmentation de l'incidence du diabète de type 2 et d'autres maladies, l'augmentation d'un point du risque de consommation excessive peut sembler négligeable. Cependant, selon cette méta-analyse, cette consommation excessive pourrait ainsi concerner plus de 2 millions de personnes dans les 14 pays représentés dans l'étude. A priori, l'effet « alcool » mérite donc bien d'être pris en compte.
Sources: BMJ 2015;350:g7772 Long working hours and alcohol use: systematic review and meta-analysis of published studies and unpublished individual participant data
BMJ 2015; 350: g7800 Long working hours are linked to risky alcohol consumption
Lire aussi: ALCOOL au travail: Les pots restent une tradition –
Plus de 50 études sur la Consommation excessive d'Alcool
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