CHANGEMENT CLIMATIQUE : Algues toxiques et bactéries nocives, ce qui nous attend d'ici 30 ans
Ces récentes études menées par un groupe de scientifiques de la (US) National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA), démontrent l'augmentation potentielle de toxines d'origine hydrique et de microbes, avec le changement climatique. Algues nuisibles, poussière liée à la désertification entraînant une augmentation des bactéries nocives dans les océans, débordements des égouts affectant la qualité de l’eau, ce n’est pas un scénario catastrophe mais des prévisions bien scientifiques…Ces recherches présentées le 20 février, lors de la réunion annuelle de the American Association for the Advancement of Science (AAAS) montrent comment le changement climatique pourrait accroître l'exposition et le risque de maladie humaine en provenance de l'océan, des régions côtières et des écosystèmes des Grands Lacs, avec une projection qui prévoit les premiers impacts à 30 ans.
" 2010, l'année la plus pluvieuse et la plus chaude enregistrée pour les températures de surface de la mer, a été l'occasion pour la NOAA et ses partenaires d'étudier comment les changements climatiques peuvent affecter à terme notre santé ", explique le Pr. Jane Lubchenco, administrateur de la NOAA. "Ces études doivent permettre de mieux prévenir les risques liés à l'évolution des océans et des zones côtières."
Les résultats ont mis en lumière la façon dont des interactions complexes entre les océans, la terre, le ciel et l'eau douce liées au changement climatique peuvent favoriser la prolifération d'algues toxiques et la prolifération de microbes et de bactéries nocives. Le changement climatique pourrait ainsi favoriser la prolifération d'algues toxiques d'ici 2040 ou plus tôt encore.
Des changements imminents dans la saison de floraison d'algues nuisibles : Grâce à l'utilisation de technologies de pointe pour prévoir l'évolution des océans et des conditions météorologiques, le Pr. Stephanie Moore, avec le Centre de la NOAA de la côte Ouest et des scientifiques de l'Université de Washington, ont pu estimer l'allongement des saisons de prolifération d'algues nuisibles dans Puget Sound (État de Washington). L'équipe a examiné les proliférations d'Alexandrium catenella (Voir vignette), plus communément appelé « marée rouge », qui produit la saxitoxine, une cyanotoxine avec des effets neurotoxiques qui peut s'accumuler dans les coquillages. Si la saxitoxine est consommés par les humains, elle peut causer des symptômes gastro-intestinaux et neurologiques comme la paralysie des muscles et des vomissements, voire le décès dans les cas extrêmes. L'allongement des saisons de prolifération d'algues pourrait se traduire par plusieurs jours de pêche en moins et des risques d'empoisonnement.
"Nos projections indiquent que d'ici la fin de ce siècle, la prolifération peut commencer jusqu'à deux mois plus tôt dans l'année et persister pendant un mois de plus par rapport à la période actuelle qui s'étend de juillet à octobre." Le même modèle pourrait être appliqué à d'autres zones côtières dans le monde, de plus en plus touchées par les floraisons algales nuisibles. Il s'agit donc d'améliorer très rapidement la prévention contre ces prochaines invasions toxiques.
Mais ce n'est pas tout : Plus de poussière dans l'atmosphère, un phénomène lié à la désertification mondiale pourrait entraîner une augmentation des bactéries nocives dans les océans, dans les fruits de mer …, concluent des chercheurs de l'Université de Géorgie. Car les dépôts de poussière de l'atmosphère du désert sont considérés comme l'un des principaux contributeurs de fer dans l'océan. Ces dépôts ont fortement augmenté au cours des 30 dernières années et devraient augmenter en fonction des tendances des précipitations en Afrique occidentale. Le fer est limité dans les milieux océaniques et est indispensable à la plupart des formes de vie. Cette étude menée en collaboration avec le US Geological Survey, montre que la seule adjonction de la poussière du désert (et de ses conséquences en matière de dépôts de fer dans l'eau de mer) stimule considérablement la croissance et la persistance des vibrions, un groupe de bactéries qui se développe dans les océans et peuvent causer des maladies gastro-entérites et infectieuses chez l'homme. Depuis 1996, les infections à Vibrio ont fait un bond de 85% aux États-Unis. Il est possible que cette contribution supplémentaire de fer, ainsi que la hausse des températures à la surface des mers, ait une incidence sur ces populations de bactéries et contribue à expliquer à la fois des augmentations actuelles et futures des maladies liées à l'exposition à l'eau de mer et à la consommation de fruits de mer contaminés.
Enfin, l'augmentation des pluies et des égouts du pourraient affecter la qualité de l'eau dans les Grands Lacs, provoquant la libération de bactéries pathogènes et de virus dans l'eau potable et sur les plages. Ici, des chercheurs de l'Université de Wisconsin prévoient une augmentation de 20% en volume des débordements, avec des durées « d'inondation » plus longues.
«Ces nouvelles études doivent permettre aux gestionnaires locaux de se préparer à des changements réels et prévus dans leurs régions pour protéger au mieux la sécurité de leurs administrés ».