COVID-19 : Et si la maladie grignotait les télomères ?
Cette équipe du Centro Nacional de Investigaciones Oncológicas (CNIO, Madrid) effectue un constat surprenant : les patients atteints d'une maladie COVID-19 sévère ont des télomères significativement plus courts. Ces nouvelles données publiées dans la revue Aging suggèrent que le raccourcissement des télomères à la suite de l'infection virale entrave la régénération tissulaire, ce qui contribuerait à expliquer qu’un nombre important de patients souffrent de séquelles prolongées. Se pose également la question d’une accélération du vieillissement post-COVID-19 ?
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Cependant, les conclusions de cette étude ne sont pas si simples. Car si le raccourcissement des télomères semble induit par l’infection SARS-CoV-2, l’association entre une plus grande sévérité de COVID-19 et des télomères plus courts peut également partiellement s’expliquer par des télomères plus courts à l’âge avancé, un âge de plus grande vulnérabilité à COVID-19. Mais pas seulement. Enfin, les caractéristiques moléculaires du vieillissement, dont des télomères plus courts, pourraient aussi influencer la sévérité de la maladie.
Maladie plus sévère et télomères raccourcis
L’étude dirigée par le Dr Maria A. Blasco du CNIO n’a pu suivre que 89 patients. « Les installations hospitalières pour les patients COVID-19 étaient débordées, il n’a été possible d'analyser les télomères que de 89 patients admis à l'hôpital de campagne de l'IFEMA de Madrid ». Le chercheur, expert du rôle des télomères dans la régénération tissulaire, développait déjà une thérapie pour régénérer le tissu pulmonaire chez les patients atteints de fibrose pulmonaire au moment de l’émergence de COVID-19. Â
Télomères et régénération tissulaire : les télomères sont des structures qui protègent les chromosomes dans chaque cellule de l'organisme. On sait que la longueur des télomères est un indicateur du vieillissement : chaque fois qu'une cellule se divise, ses télomères se raccourcissent jusqu'à ce qu'ils ne puissent plus remplir leur fonction protectrice et la cellule, qui s'endommage, cesse de se diviser. Tout au long de la vie, les cellules se divisent constamment pour régénérer les tissus, et lorsqu'elles cessent de se diviser parce que les télomères sont trop courts, le corps vieillit.
Cependant, ces dernières années, des chercheurs ont montré chez la souris qu'il est possible d'inverser ce processus en activant la production de télomérase, l'enzyme chargée d'allonger les télomères. Chez les animaux, l'activation de la télomérase est efficace dans le traitement des maladies associées au vieillissement et aux lésions des télomères, telles que la fibrose pulmonaire.
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COVID-19 et télomères : dans la fibrose pulmonaire, le tissu pulmonaire développe des cicatrices (ou fibrose) qui en raison de leur rigidité, entraînent une perte progressive de la capacité respiratoire. L’équipe avait déjà montré lors de précédentes études que l'une des causes de la maladie est la lésion des télomères des cellules impliquées dans la régénération du tissu pulmonaire, les pneumocytes alvéolaires de type II.
Ce sont précisément les cellules que le coronavirus SRAS-CoV-2 infecte dans les tissus pulmonaires.
L’implication des pneumocytes alvéolaires de type II dans la maladie COVID-19 a suggéré ainsi l’implication des télomères. De plus, de nombreuses études documentaient un effet de fibrose dans les reins avec COVID-19, ce qui suggérait aussi que l'infection virale pouvait entraver la régénération des tissus.
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Des hypothèses confirmées chez les participants à l’étude : ces patients atteints de lésions pulmonaires avec COVID-19 développent une fibrose pulmonaire en raison de télomères plus courts, ce qui limite la capacité de régénération de leurs poumons.
- Une association entre une forme sévère de COVID-19 et des télomères plus courts est ainsi constatée. Et si l’âge entre en ligne de compte dans la longueur des télomères, cette association est retrouvée quel que soit l’âge du patient… « Nous constatons que les patients qui ont des pathologies COVID-19 plus sévères ont des télomères plus courts à différents âges par rapport aux patients atteints de formes plus bénignes ».
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La relation joue-t-elle dans l’autre sens ? C’est aussi ce que suggèrent les scientifiques : les caractéristiques moléculaires du vieillissement, dont des télomères plus courts, pourraient aussi influencer la sévérité de la pathologie COVID. Alors que pourrait-on « y faire » ? Ces experts travaillent depuis des années sur le développement de thérapies géniques pour les patients atteints de lésion pulmonaire. Ils vont maintenant infecter des souris à télomères courts et privées de télomérase avec le SARS-CoV-2 qui devraient donc développer une fibrose pulmonaire plus sévère. Une telle confirmation ouvrirait la porte à de nouvelles stratégies de traitement, basées sur l'activation de la télomérase.
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En d’autres termes, rallonger les télomères courts par la télomérase, pourrait apporter un bénéfice thérapeutique en cas de maladies caractérisées par des télomères courts, comme la fibrose pulmonaire et COVID-19.
C’est d’ailleurs l’objectif de la biotech Telomere Therapeutics, créée par l’équipe du CNIO et l'Université autonome de Barcelone (UAB), qui cherche à développer une thérapie génique à base de télomérase pour le traitement de différentes pathologies liées au raccourcissement des télomères.
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Enfin, il reste également à se poser une dernière question : le raccourcissement des télomères implique-t-il accélération du vieillissement et réduction de la durée de vie ? Â