COVID-19 : La propagation asymptomatique, une ruse évolutive du virus ?
Cette équipe de scientifiques de Princeton explore le rôle de la transmission asymptomatique et émet une hypothèse originale : la propagation silencieuse et asymptomatique de COVID-19 pourrait être une stratégie évolutive réussie du coronavirus SARS-CoV-2 ? C’est la conclusion de cet examen des stratégies évolutives qu’emploient différents agents pathogènes, présenté dans les Actes de l’Académie des Sciences américaine. Et il faut bien reconnaître, dans le cas d’espèce, que la propagation rapide de COVID-19 dans le monde a été alimentée en partie par la capacité du nouveau coronavirus à être transmis par des personnes asymptomatiques.
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Les chercheurs du New Jersey étayent l’hypothèse que cette stratégie évolutive réussie à partir de l’analyse des avantages et des inconvénients d'une transmission silencieuse sur la survie à long terme du pathogène. En d’autres termes, une transmission sans symptômes permet-elle à l'agent pathogène d'infecter un plus grand nombre de personnes? Ou bien l'absence de symptômes finit-elle par réduire la transmission et réduire la survie à long terme du pathogène? La réponse à ces questions pourrait également contribuer à optimiser les stratégies de contrôle de l’épidémie telles que la distanciation et les quarantaines, les tests et le traçage des contrats.
Une transmission asymptomatique pourrait apporter certains avantages au pathogène
C’est la conclusion des auteurs, Bryan Grenfell et Kathryn Briger, chercheurs à Princeton et Sarah Fenton, professeur d'écologie et de biologie évolutive à la Woodrow Wilson School.
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L’évolution d’un virus doit servir sa survie : avec la crise du COVID-19, l'importance de cette phase asymptomatique est devenue extrêmement pertinente. Ainsi, comme les organismes plus complexes, les virus peuvent évoluer par sélection naturelle. De nouvelles variantes sont générées par mutation et si ces changements favorisent la transmission des agents pathogènes, alors cette souche du virus aura toutes les chances de se propager. Ainsi, les espèces dont les stratégies contribuent à leur transmission et leur réplication survivent, tandis que les espèces dont les stratégies ne favorisent pas la transmission (comme tuer l'hôte avant que le virus ne puisse se répliquer ou se transmettre) finissent par disparaître.
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L’équilibre nécessaire entre survie du virus et survie de l’hôte : L'évolution virale implique un compromis entre l'augmentation du taux de transmission et le maintien de l'hôte comme base de transmission. Les espèces qui gèrent ce compromis plus efficacement que d'autres vont survivre et supplanter les autres espèces.
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La transmission silencieuse comporte de multiples avantages : comme le montre la pandémie de COVID-19, une infection silencieuse présente certains avantages à court terme. Cela rend les stratégies de contrôle - telles que l'identification, la quarantaine et le suivi des contacts - difficiles à mettre en œuvre. Les personnes infectées asymptomatiques ont tendance à vivre leur vie et à poursuivre les contacts avec de nombreux hôtes vulnérables. Ainsi, le virus peut circuler en toute impunité. En revanche, un cas symptomatique aura tendance à s’isoler rompant pratiquement spontanément la chaîne de transmission.
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La transmission asymptomatique comporte également un inconvénient « pour le virus » : les personnes asymptomatiques peuvent générer moins de particules infectieuses et donc vont transmettre le virus dans une moindre mesure. La transmission globale pourrait même être réduite au fil du temps.
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La modélisation pour explorer les compromis entre ces différents scénarii : ces travaux entrepris sur la grippe, bien avant l’émergence du nouveau coronavirus ont permis le développement d’un modèle simple permettant de comprendre pourquoi l'évolution pourrait favoriser un tel mode de transmission. Le modèle a pris en compte toute la variété de comportements adoptés par les agents pathogènes et qui contribuent à leur propagation. Certains virus, comme le VIH, se propagent avant que les symptômes ne soient identifiés. D'autres virus se transmettent au moment même où les symptômes apparaissent. Mais la plupart des agents pathogènes utilisent une combinaison de stratégies silencieuses et symptomatiques.
Pour étudier l'effet de la transmission sans symptômes, l'équipe a apporté des modifications à un modèle mathématique standard de la façon dont une maladie se propage à travers une population. Le modèle décompose la population en compartiments représentant des individus encore vulnérables, infectés et ayant récupéré. Les chercheurs ont notamment divisé le compartiment « infecté » en deux étapes.
- Au premier stade de l’infection, les chercheurs ont fait varier le niveau des symptômes afin que certaines personnes soient asymptomatiques, d'autres présentent des symptômes modérés et d'autres enfin des symptômes sévères ;
- au deuxième stade de l’infection, toutes les personnes deviennent symptomatiques ;
- enfin, l’équipe a pris en compte l'effet de la variation des symptômes sur la propagation de la maladie.
Ce modèle montre que :
des stratégies efficaces émergent avec un premier stade de l'infection complètement asymptomatique, pleinement symptomatique et quelque part entre les deux.
Le virus s’adapte en fonction des stratégies de réponse de l’hôte : les chercheurs constatent également que la gamme de sévérité des symptômes, de l'absence de symptômes aux symptômes sévères, pouvait être modifiée par de petits changements dans les stratégies de contrôle de la maladie. Cette dernière partie de l'analyse suggère que les stratégies de contrôle menées sur de longues périodes, peuvent influencer la stratégie déployée par le pathogène et donc avoir un impact sur le cours de l’épidémie.
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En conclusion, selon ces scientifiques, le coronavirus SARS-CoV-2 utilise une stratégie évolutive « classique » qui comprend une part de transmission asymptomatique qui sert en somme sa propagation.