CRÉATIVITÉ: Les preuves génétiques du grain de folie
La créativité partage certains de ses facteurs génétiques avec la schizophrénie et les troubles bipolaires, confirme cette étude d'association pangénomique menée par des chercheurs de l'Institut de psychiatrie du King College de Londres. Les conclusions de ces travaux, présentées dans la revue Nature Neuroscience situent la créativité à mi-chemin, en termes de score de risque génétique entre la santé mentale et la maladie psychiatrique. La créativité serait une prédisposition génétique à penser différemment, qui, sous l’influence d'autres facteurs biologiques ou environnementaux, pourrait conduire à la maladie mentale.
Ce n'est pas la première étude à suggérer cette association. Une étude de 2012, en particulier, menée par une équipe du Karolinska Institute sur mes données de suivi durant 40 ans de plus d'1 million de participants, montre une prévalence plus élevée de la maladie mentale chez les personnes ayant des professions artistiques ou scientifiques, tels que les auteurs, les chercheurs, les photographes ou encore les danseurs. Ce sont les écrivains qui apparaissent les plus touchés notamment par la schizophrénie, la dépression, l'anxiété et la toxicomanie. Cette nouvelle étude apporte des preuves sur l'influence directe de gènes « de la créativité » chez les personnes atteintes de schizophrénie et de trouble bipolaire.
La créativité est difficile à définir et à évaluer (cf cette étude récente de de l'université de Stanford). Les chercheurs considèrent que la créativité passe par de nouvelles approches nécessitant des processus cognitifs différents des modes de pensée ou de d'expression habituels. Or la schizophrénie et le trouble bipolaire pourraient aussi être définis par des troubles de la pensée et de l'humeur ce qui implique des anomalies dans le traitement cognitif et émotionnel. Si l'histoire est pleine d'exemple d'artistes psychotiques, cette étude est la première à apporter des preuves génétiques de cette proximité entre créativité et psychose.
Les chercheurs ont analysé les scores de risque génétiques sur un échantillon de 86.292 participants, parmi lesquels les sujets créatifs ont été définis comme appartenant aux sociétés artistiques nationales des acteurs, danseurs, musiciens, peintres et écrivains. L'analyse constate que les scores de risque génétiques pour la schizophrénie et le trouble bipolaire sont significativement plus élevés chez les sujets créatifs, avec des scores se situant à mi-chemin entre le score moyen en population générale et les niveaux de patients atteints par ces troubles.
L'étude confirme ainsi une influence directe de facteurs génétiques sur la créativité, communs à la schizophrénie ou au trouble bipolaire.
A mi-chemin entre la normalité et la maladie mentale ? Une théorie énoncée par les auteurs est que les troubles de santé mentale refléteraient en fait un extrême du spectre normal de comportements humains et que la créativité, un comportement sain, partagerait une partie de sa biologie sous-jacente avec ces troubles psychiatriques. Les créatifs pourraient donc avoir une prédisposition génétique à penser différemment, qui, sous l'influence d'autres facteurs biologiques ou environnementaux, pourrait conduire à la maladie mentale.
Source: Nature Neuroscience 08 June 2015 doi:10.1038/nn.4040 Polygenic risk scores for schizophrenia and bipolar disorder predict creativity
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