E. coli: Le résultat d'une utilisation abusive des antimicrobiens, avertissent les experts
En pleine épidémie d’E. coli, ces experts de l'Institut national de l'alimentation du Danemark rappellent la responsabilité de l’utilisation excessive des antibiotiques dans l'élevage qui favorise la montée des résistances et des risques sur la santé future des animaux mais aussi des Hommes. C’est une véritable mise en garde que cet éditorial publié dans l’édition du 1er juin du Student BMJ.
Le Dr. Jørgen Schlundt et ses collègues de l'Institut national de l'alimentation au Danemark font valoir que l'utilisation systématique des antibiotiques peut être sensiblement réduite, tout en maintenant la rentabilité de la production animale et appellent donc à une surveillance plus sévère de leur utilisation dans tous les pays. Les antimicrobiens sont essentiels pour traiter les infections bactériennes chez les humains et les animaux. Des volumes très (trop) importants sont utilisés dans la production animale moderne et leur utilisation peut entraîner le développement de bactéries résistantes aux traitements. Ces bactéries résistantes se propagent ensuite des animaux aux humains, principalement à travers la chaîne alimentaire.
3 des 4 infections émergentes récentes chez l'homme proviennent des animaux, la grippe aviaire H5N1, le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) et les infections à Salmonella, rappellent les chercheurs.
Plusieurs organisations internationales ont déjà proposé une série d'actions pour endiguer la résistance aux antimicrobiens provenant des bactéries animales, dont l'utilisation restreinte chez les animaux des antibiotiques les plus utiles pour l'Homme. L'Union européenne a commencé sa surveillance de la résistance chez l'animal et met en œuvre une surveillance obligatoire de l'utilisation des antimicrobiens dans tous les Etats membres. Au Danemark, rappellent ces experts, c'est déjà le cas depuis 1995.
Les expériences enrichissantes du Danemark et de la Norvège: Des règles plus strictes ne conduisent pas forcément à une baisse de productivité. Au Danemark, l'utilisation d'agents antimicrobiens par kilogramme de porc produit est estimée à moins d'un cinquième de celle des États-Unis, et pourtant le Danemark continue d'être le premier exportateur mondial de viande de porc et sa productivité est aujourd'hui plus élevée que jamais.
L'expérience de la Norvège montre, quant à elle, que l'introduction de vaccins efficaces a permis d'améliorer la gestion piscicole et peut permettre de diviser par 20 l'utilisation des antimicrobiens.
“Le confinement mondial de la résistance, en médecine vétérinaire et humaine est un défi mondial” écrivent les auteurs. "Les antimicrobiens sont trop précieux pour être gaspillés. Une réduction substantielle de l'utilisation des antimicrobiens dans l'élevage est possible et nécessaire si nous voulons préserver le pouvoir des antibiotiques pour les générations futures que ce soit humaines ou animales”.
Depuis janvier 2006, la législation communautaire sur l'alimentation animale interdit l'usage d'antibiotiques utilisés pour favoriser la croissance dans les aliments pour animaux. En France, également, l'utilisation systématique des antibiotiques dans l'alimentation du bétail pour accélérer la croissance des animaux est interdite. Ces traitements devraient être réservés à des fins thérapeutiques pour prévenir la propagation des pathologies ou soigner les animaux malades.