GUÉRISON à DISTANCE : Bien plus qu’un simple effet placebo ?
La guérison à distance suscite un intérêt croissant non seulement de la part du public mais aussi de la communauté scientifique. Mais quelles sont les preuves scientifiques des bénéfices de ces thérapies intentionnelles, qui revendiquent pouvoir transcender les contraintes habituelles de distance, voire, « faire mieux » à distance qu’en consultation en présentiel ?
La question se pose d’autant plus en fin de cette période pandémique durant laquelle la télémédecine et les téléconsultations ont pris toute leur ampleur. De récents examens de la littérature et méta-analyses ont exploré un large éventail de thérapies à distance, évalué leurs résultats et comparé différents protocoles expérimentaux.
Si des effets expérimentaux significatifs sont confirmés, et la preuve de concept dans certains cas apportée, d’autres recherches restent nécessaires pour préciser les niveaux d'efficacité clinique des différentes thérapies d'intervention à distance.
Une méta-analyse (1) apporte déjà une première photographie du spectre de thérapies de guérison à distance (ou distant healing intention” (DHI) therapies).
La thérapie de guérison à distance est ici définie comme un acte mental compatissant dirigé vers la santé et le bien-être d'une personne distante. Les méthodes les plus connues comprennent le toucher thérapeutique « mais » sans contact (TT), le toucher quantique à distance, le qi gong - une gymnastique traditionnelle chinoise et une technique de respiration, la guérison reconnective - une approche de guérison énergétique globale, Johrei-une thérapie alternative qui va canaliser la lumière vers le corps du patient et enfin, Reiki - une méthode japonaise, également fondée sur des soins énergétiques.
Alors que depuis des siècles et dans pratiquement toutes les cultures, il existe des rapports de guérisons documentés comme liés à « l’intention à distance », il reste essentiel d’évaluer ces thérapies plus ésotériques au plan clinique, en particulier en comparant l’efficacité de leurs variantes « physiques » classiques, proximales (mais sans contact nécessairement) et distantes.
Succès et engouement croissants pour ces thérapies
Une récente méta-analyse (1), relève le succès croissant de ces thérapies : en 2000, il y avait plus de guérisseurs à distance au Royaume-Uni (soit environ 14.000), que de thérapeutes pratiquant toute autre forme de médecine complémentaire ou alternative.
L’évaluation des bénéfices cliniques de ces thérapies relève du défi : la distance, objet même de l’interrogation sur l'efficacité de ces thérapies, est aussi le facteur qui soulève le plus de défis méthodologiques et théoriques : car comment corréler, de manière scientifique, un facteur et un résultat à distance. Leur caractère distanciel défie les hypothèses physiques et explique leur statut controversé.
Les thérapies de guérison à distance, est-ce que « ça marche » ? C’est la question au centre de la plupart des expériences menées sur ces thérapies, une question en 2 points :
- Quelle preuve de concept : existe-t-il des données empiriques que 2 personnes séparées par la distance puissent s’affecter de quelque manière que ce soit ?
- Quelle efficacité réelle : les thérapies de guérison à distance peuvent-elles et ont-elles apporté des bénéfices thérapeutiques ?
La preuve de concept : de très nombreuses expériences ont été menées, de connexion d'esprit à esprit, d’interaction directe entre l'esprit et la matière et d’interactions mentales à distance avec des systèmes vivants (DMILS : Direct mental interactions with living systems).
- La grande majorité des méta-analyses (2,3,4) confirment la preuve du concept que A peut affecter B à distance. Ainsi, les chercheurs citent 40 études dont 36 expériences suivant une méthodologie satisfaisante qui aboutissent à un effet homogène et statistiquement significatif.
- Si l’effet observé est le plus souvent de petite ampleur, les corrélations observées dans ces expériences contrôlées ont pu été répétées avec succès dans des laboratoires du monde entier.
Sur l’efficacité,
- une seule méta-analyse (5) a tenté d'intégrer les effets de ces thérapies sur des systèmes vivants simples. 34 sur les 49 études confirment une amélioration significative du bien-être dans les groupes d’intervention. Cependant, cet effet de guérison peut avoir été biaisé par de mauvaises méthodologies et devra être mieux démontré ;
- des essais cliniques (chez l’Homme) ont également été menés. Une méta-analyse (6) couvrant 23 de ces études impliquant 2.774 patients, montre que 13 études sont en faveur d’effets de traitement statistiquement significatifs ;
- une autre revue systématique qui compare les variantes à distance aux interventions de guérison pratiques montre que sur 90 essais contrôlés randomisés en laboratoire et cliniques, les interventions de guérison à distance présentent une validité interne plus élevée (75 % ) par rapport à la guérison manuelle (65 %). Là encore, cependant, d’autres recherches exemptes de défauts méthodologiques, devront être menées.
- Une autre revue (7) de 57 études, montre, pour 47 % des études au moins 1 résultat significatif en faveur de la thérapie de guérison à distance vs groupe de contrôle standard et vs placebo ;
- enfin, on ne peut ignorer les 2 examens de la littérature de la Cochrane Collaboration, le premier examinant le toucher thérapeutique sans contact et le Reiki et la deuxième la prière d'intercession (8,9). Le Reiki apparaît pouvoir réduire l’intensité de douleur, la prière d'intercession ne démontre pas ici d'efficacité thérapeutique significative.
La relation entre guérisseurs, patients (et chercheurs) apparaît un facteur essentiel de l’efficacité thérapeutique (ou de la recherche), tout comme le contexte et l'environnement de la thérapie : cela suggère l’importance d'un contexte de confiance et de bien-être avant de commencer la thérapie.
En conclusion, toutes ces analyses suggèrent que les thérapies de guérison à distance constituent un concept « qui se défend » mais lorsqu'il s'agit d'évaluer précisément l'efficacité clinique de ces thérapies, la qualité méthodologique des études manque à l’appel. Les données actuelles relèvent plus d’effets de changements physiologiques plutôt que de preuves robustes de guérison.
Ainsi, si de nombreux rapports de cas sont en faveur de l’efficacité possible de ces thérapies, si « la science » démontre encore une fois que 2 personnes séparées par la distance peuvent mutuellement s’affecter, des recherches de meilleure qualité (de type ECR) devront être menées pour valider les bénéfices précis de ces différentes thérapies intentionnelles.
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