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MARATHON : Attention au risque de lésion rénale

Actualité publiée il y a 5 années 1 mois 2 semaines
Clinical Journal of the American Society of Nephrology
Durant un marathon, les pertes de liquide et de sel (sueur) peuvent entraîner une lésion rénale.

Cette étude de la Johns Hopkins Medicine (Baltimore) et de l'Université de Yale, présentée dans le Clinical Journal of the American Society of Nephrology, suggère que durant un marathon, les pertes de liquide et de sel (sueur) peuvent entraîner une lésion rénale. Alors que ces pertes sont les principales causes de lésions rénales aiguës après la course, plutôt que l’augmentation de la température corporelle, les auteurs engagent ces sportifs, à un régime personnalisé durant les jours qui précèdent l’épreuve.

 

Le marathon, une course de 42,195 kms, inscrite dans l’histoire antique, est un exercice qui attire environ 1,3 million de coureurs chaque année qui participent à plus de 800 courses organisées dans le monde. Si ces coureurs se sont obligatoirement entraînés et sont donc bien préparés, ils restent confrontés à une menace physique à court terme mais toujours sévère, la lésion rénale aiguë. Cette étude menée auprès de marathoniens suggère que les pertes de sueur et de sodium, sont les principaux facteurs de lésion rénale après la course.

La lésion rénale aiguë concerne 50 à 80% des marathoniens

Une étude précédente (2) avait suggéré une incidence non négligeable de ce type de lésion post-marathon, cette nouvelle étude tente d’en identifier les causes. Le Dr Chirag Parikh, directeur du Service de néphrologie de la faculté de médecine de l’Université Johns Hopkins et auteur principal explique que « l’étude suggère que la gestion du volume de fluide et des pertes en sel avec un régime personnalisé pendant la période précédant le marathon peut contribuer à réduire l’incidence et la gravité de ces incidents ».

 

Un événement soudain bien caractérisé : c’est ainsi que les chercheurs décrivent l’épisode soudain d'insuffisance rénale ou l’apparition de la lésion rénale. Quelques heures ou quelques jours suffisent à cette accumulation de déchets dans le sang, ce qui empêche les reins de maintenir le bon équilibre des fluides dans le corps. Avec des symptômes bien caractéristiques :

  • trop peu d'urine lors des mictions,
  • un gonflement des jambes, des chevilles et du contour des yeux ;
  • une grande fatigue ;
  • l’essoufflement ;
  • la confusion ;
  • la nausée ;
  • une douleur de poitrine ;
  • et dans les cas les plus sévères des convulsions voire un coma.

82% des coureurs présenteraient une insuffisance rénale légère à sévère d'une durée moyenne de deux jours.

 

Un stress extrême et prolongé : le marathon soumet aussi le coureur à un stress physique prolongé, à une réduction du flux sanguin vers les reins et à une augmentation significative du taux métabolique. Ensemble, ces événements mettent sérieusement à l'épreuve la capacité du corps à maintenir en équilibre le volume de fluide, les électrolytes et la température corporelle.

 

L’augmentation des niveaux de copeptine dans le sang : principal résultat de l’étude, le constat chez ces coureurs victimes de lésion rénale aiguë post-marathon, de niveaux accrus d’une protéine sérique, la copeptine. Si cette corrélation était confirmée par de plus larges études, la copeptine pourrait être un biomarqueur précieux pendant l’entraînement pour prédire le risque de lésion rénale.

 

Facteurs de risque et processus sous-jacent : La nouvelle étude est menée auprès de 23 coureurs âgés de 22 à 63 ans, hommes et femmes, recrutés par l'intermédiaire de clubs locaux de marathon. Les participants avaient un IMC compris entre 18,5 et 24,9 et avaient effectué au moins 4 courses de plus de 20 kilomètres au cours des 3 années précédentes. Des échantillons d'urine et de sang ont été prélevés à 3 moments différents: 24 heures avant le marathon, dans les 30 minutes suivant la fin de la course et 24 heures après. Les chercheurs ont évalué les échantillons pour les niveaux de sodium, de molécules clés dont la créatine phosphokinase, l'hémoglobine, les protéines urinaires et la copeptine, et de biomarqueurs associés à une lésion rénale tels que l'interleukine 18 et KIM-1 (Kidney injury molécule-1). Des patchs de collecte de sueur avaient également été placés sur les coureurs avant le marathon et récupérés à 8 km. La tension artérielle, la fréquence cardiaque et le poids ont été mesurés et la température corporelle était enregistrée tout au long de la course. L’expérience montre que :

 

  • 55% des coureurs (12 sur 23) ont développé une lésion rénale après la course ;
  • 74% (17 sur 23) ont été testés positifs pour des marqueurs indiquant une lésion des tubules rénaux ;
  • Chez les coureurs avec lésion, la perte de sel médiane est de 2,3 grammes (soit 1,25 cuillère à café) et s’élève jusqu'à 7 g,
  • la perte de volume de liquide via la sueur atteint un niveau moyen de 2,5 litres avec un maximum de 6,8 litres. Sachant qu’un corps de 70 kilos contient environ 42 litres de liquide.
  • La température corporelle centrale, bien que significativement élevée tout au long du marathon, est similaire pour tous les coureurs et, par conséquent, ne peut être considérée comme un facteur de causalité de lésion rénale post-marathon. Cependant, les chercheurs suggèrent que combinée aux pertes de liquide et de sel, elle pourrait tout de même contribuer au développement de lésions rénales.

 

 

Lésion rénale, copeptine et vasopressine : L'incapacité d'équilibrer les pertes de sodium et de liquide au cours du marathon pourrait expliquer le développement de la lésion rénale mais aussi les taux plus élevés de copeptine observés chez les coureurs atteints : la copeptine est un précurseur de la libération de vasopressine, une hormone sécrétée par l'hypophyse en réponse à une réduction du volume sanguin. Elle « demande » à nos reins et à nos vaisseaux sanguins de retenir l'eau, afin d’éviter justement cette chute drastique de niveau. Chez les coureurs qui ont développé une lésion rénale, les taux de copeptine sont jusqu'à 20 fois supérieurs. Enfin, comme la vasopressine réduit le flux sanguin vers les reins, ainsi que la filtration rénale et le débit urinaire, elle peut, en excès sur une période prolongée, provoquer une inflammation et des lésions des tissus rénaux. Cela peut donc expliquer pourquoi un grand nombre de marathoniens développent ces lésions.

D’autres études menées sur un plus grand nombre de coureurs devront évaluer si l'optimisation des volumes de liquide et de sel chez les coureurs de marathon est suffisante à abaisser les taux de copeptine (et donc de vasopressine) et de réduire ainsi l’incidence et/ou la sévérité des lésions rénales post-marathon.

 

L'objectif à long terme sera donc de documenter le profil métabolique et le profil de sudation du coureur afin de mettre au point un régime personnalisé de remplacement des fluides et du sel.


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