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MÉTASTASES : Les cellules tumorales ne supportent pas la promiscuité

Actualité publiée il y a 4 années 2 mois 1 jour
Science
Comme les personnes, les cellules du corps humain protègent leur espace personnel. Elles semblent savoir de combien d'espace elles ont besoin, et lorsque la tumeur est trop confinée, elles préfèrent se libérer et s'échapper (Visuel Wojciech Garncarz (St. Anna Children's Cancer Research Institute))

Comment les cellules cancéreuses s’échappent des tumeurs, c’est l’objet de la recherche de cette équipe du St. Anna Children's Cancer Research Institute (Vienne) qui développe une théorie originale : Comme les personnes, les cellules du corps humain protègent leur espace personnel. Elles semblent savoir de combien d'espace elles ont besoin, et lorsque la tumeur est trop confinée, elles préfèrent se libérer et s'en échapper. Ce mécanisme est documenté pour la première fois dans la revue Science.

 

Le mécanisme permettant aux cellules d'échapper aux environnements surpeuplés implique un acteur inhabituel, le noyau cellulaire. C'est la grande découverte de ces chercheurs autrichiens avec leurs collègues du King's College de Londres, de l'Institut Curie Paris et de l'ETH Zürich.

Les cellules cancéreuses prennent leurs aises

Le corps humain se compose de milliards de cellules qui prospèrent dans des volumes confinés, ce qui conduit souvent au surpeuplement cellulaire. L'effet d'encombrement est exacerbé pendant la formation de la tumeur alors que la croissance cellulaire est incontrôlée.

 

Comment les cellules tumorales font-elles face au manque d'espace et aux contraintes de compression ? Les cellules sont d’abord capables de détecter la compression environnementale, expliquent les scientifiques qui montrent la déformation physique du noyau provoque le dépliage et l'étirement des membranes nucléaires. Ces changements sont alors détectés par des protéines spécialisées, qui activent « la contractilité cellulaire ». Cette capacité à développer des forces contractiles permet alors à la cellule de s’échapper de son microenvironnement surpeuplé.

 

Un « réflexe d'évasion » cellulaire :

le noyau fonctionnerait ainsi comme un outil de mesure ;

le noyau permettrait aux cellules d’apprécier leur espace personnel et de déclencher, si besoin, des réponses spécifiques si leur espace personnel devient trop étroit. Cette identification du noyau cellulaire comme un acteur actif qui convertit rapidement les entrées mécaniques en signaux est surprenant. Les scientifiques suggèrent même que des degrés élevés de déformation nucléaire pourraient être prédictifs du risque métastatique et de résistance à la chimiothérapie et à l'immunothérapie.

 

Inhiber une protéine, cPLA2 qui favorise l'évasion cellulaire : la protéine en question, dépendante du calcium (Ca2+) détecte l'étirement de la membrane nucléaire lors de la compression cellulaire. Dès lors, cPLA2 apparaît comme une cible prometteuse puisqu’elle conditionne l’évasion cellulaire, le mécanisme qui dans le cas de la tumeur, peut mener à la métastase. L'auteur principal Alexis Lomakin, confirme en expliquant que des laboratoires pharmaceutiques testent actuellement des inhibiteurs de cPLA2 : réduire l'activité de cPLA2 dans les cellules tumorales pourrait réduire leur capacité à échapper à la tumeur primaire et à se métastaser à des sites distants.

 

Réduire les apports d’ARA (acide arachidonique, omega-6) : les inhibiteurs de la cPLA2 empêchent la production d'acide arachidonique (ARA), qui affecte par la suite la migration, la croissance et la survie des cellules. Cependant, l'ARA peut également être obtenu par les cellules à partir de leur environnement. Le régime alimentaire occidental, par exemple, est une source d’ARA. La restriction des graisses alimentaires et la consommation d'acides gras omega-3 au lieu d'acides gras omega-6 pourrait créer une synergie avec les inhibiteurs de cPLA2 pour atténuer efficacement la fuite des cellules tumorales des zones tumorales « surpeuplées ».

 

Depuis de nombreuses années, les pathologistes évaluent les changements dans la forme du noyau pour faire la distinction entre les différents stades de la croissance tumorale, rappellent les chercheurs ; cependant, la façon dont ces altérations structurelles et mécaniques du noyau ont un impact fonctionnel sur le comportement des cellules cancéreuses était jusque-là inconnue.


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