NEURO: La punition est sans effet sur le criminel psychopathe
Récompense ou punition, 2 notions que les criminels psychopathes n'appréhendent pas comme les autres criminels. Cette étude de l’Université de Montréal montre, par IRM, que chez ces deux profils de criminels, avec ou sans psychopathie, plusieurs anomalies dans de nombreuses zones du cerveau, spécifiques à chaque profil, vont conditionner les réponses à la menace et à l’agression, à la punition et à la récompense, et, enfin de compte à différents programmes de réhabilitation. Des conclusions, présentées dans le Lancet Psychiatry, qui visent à permettre de concevoir les programmes efficaces visant la réduction de la criminalité et des récidives.
Sheilagh Hodgins et Nigel Blackwood de l'UdeM rappellent que tous les détenus et les criminels ne sont pas psychopathes et seuls 20% vont recevoir un diagnostic de psychopathie : Des criminels qui « présentent des taux supérieurs de récidives et ne répondent pas bien aux programmes de réhabilitation ». Pourquoi ? Les psychopathes ont un comportement spécifique. Ils se distinguent notamment des autres criminels par une faible réaction faux menaces, un comportement froid et une violence délibérée. Alors comment les « réhabiliter » ?
Criminels, avec ou sans psychopathie et anomalies cérébrales : les chercheurs identifient par IRM des anomalies touchant la matière grise, qui traite l'information et les processus cognitifs et la substance blanche coordonne la transmission de l'information entre les différentes parties du cerveau, chez ces deux profils de criminels, avec (n=12) ou sans psychopathie (n=20), vs 18 sujets témoins « normaux ». En particulier, ils notent la présence d'anomalies de la matière grise, dont un volume plus faible dans le cortex préfrontal antérieur et dans des zones des lobes temporaux, et de certaines fibres nerveuses de la matière blanche chez les criminels violents atteints de psychopathie. Du « côté » de la matière grise, les zones repérées sont associées à l'empathie, au traitement des émotions pro-sociales, comme la culpabilité et l'embarras, et au raisonnement moral. Du côté de la substance blanche, au manque d'empathie propre à la psychopathie. Enfin, ces zones jouent un rôle dans l'apprentissage au moyen de récompenses et de punitions.
Les psychopathes n'apprennent pas par la punition : Si le retour à un comportement normal suppose de tirer des leçons des punitions, réelles ou imaginaires, chez les criminels psychopathes, les punitions ne semblent pas modifier le comportement. Lorsque les criminels psychopathes et non psychopathes accomplissent une tâche de nature à pouvoir évaluer leur capacité d'adaptation, les criminels psychopathes échouent en ne tirant aucun leçon des indices d'échec précédents. Ce comportement a son équivalent dans le cerveau : Les criminels atteints de psychopathie, vs criminels violents sans psychopathie et témoins, présentent des réactions anormales aux punitions dans le cortex cingulaire postérieur et dans l'insula lorsqu'une réponse auparavant « récompensée » est refusée ou « punie ». Des observations qui suggèrent chez les psychopathes une organisation particulière du réseau impliqué dans l‘apprentissage par punitions et récompenses.
Une histoire qui commence à l'enfance: Pendant l'enfance, les criminels psychopathes et non psychopathes sont punis à répétition par leurs parents et professeurs parce qu'ils ne suivent pas les règles ou agressent les autres. A l'adolescence, ils sont fréquemment incarcérés. Ils persistent néanmoins à présenter un comportement violent envers les autres sauf parfois, en cas d'interventions basées sur l'apprentissage, qui peuvent modifier la structure et le fonctionnement du cerveau. Cependant, si ces programmes peuvent mener à d'importantes réductions des problèmes de comportement chez certains enfants, ils ont peu de résultats chez ceux qui sont durs et insensibles.
La punition est donc sans effet sur le criminel psychopathe, en quelque sorte privé de ce mode d'apprentissage. Un point qui peut être utile dans la prévention des récidives… Enfin les problèmes de comportement se développant généralement dès le plus jeune âge, des interventions basées sur l'apprentissage ciblés chez certains jeunes, encore sensibles à ce mode d'apprentissage, pourraient permettre de réduire la criminalité.
Source: The Lancet Psychiatry le 28 janvier 2015 DOI: 10.1016/S2215-0366(14)00071-6 Punishment and the psychopath: an fMRI investigation of reinforcement learning in violent antisocial personality disordered men
Lire aussi: PSYCHOLOGIE des tueurs: L'analyse des mots pour détecter les psychopathes
PSYCHOPATHIE : L'excès de DOPAMINE, source de comportements psychopathes - -
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