SEVRAGE TABAGIQUE : Les médicaments agissent aussi sur les réponses du cerveau
Les médicaments de sevrage tabagique, bupropion (Zyban) et varénicline (Champix) pourraient aussi être associés à des modifications dans les modes de réaction du cerveau face aux incitations à la cigarette, permettant ainsi aux patients de mieux résister à leur envie, selon deux études publiées en ligne le 3 janvier dans les Archives of General Psychiatry, une des revues du JAMA.
«Différentes incitations dans notre environnement entretiennent l'envie de la cigarette, encourage les fumeurs dans leur tabagisme et la rechute chez les anciens fumeurs (…) Les analyses d'imagerie cérébrale par IRM fonctionnelle (IRMf) et par tomographie ont permis de mieux comprendre les régions du cerveau associées aux réactions aux incitations à fumer. Les fumeurs dépendants de la nicotine présentent une activité dans les régions du cerveau liées à l'attention (cortex préfrontal), l'émotion (l'amygdale), la récompense (aire tegmentale ventrale située au centre du cerveau) et la motivation (striatum) pendant la visualisation des signaux liés à la cigarette. "
Le Bupropion, initialement utilisé comme antidépresseur, est prescrit pour aider à la désaccoutumance au tabac les patients souffrant de dépression et est devenu aujourd'hui l'un des traitements les plus courants de sevrage tabagique dans le monde. Il est reconnu pour réduire l'envie en réponse à des incitations à fumer, mais son mécanisme n'est toujours pas bien compris.
Dans la première étude, le Pr. Christopher S. Culbertson, de l'Université de Californie (Los Angeles) et coll. ont évalué les changements dans l'activation du cerveau en réponse à des incitations à fumer chez 30 fumeurs sous bupropion ou sous placebo pendant 8 semaines. Les participants ont passé une IRMf dans la semaine d'inclusion dans l'étude puis de nouveau après huit semaines de traitement. Au cours de l'étude, on a montré aux participants des vidéos de 45 secondes qui comportaient soit des incitations à fumer avec des acteurs en train de fumer. Les participants disposaient d'un boîtier de réponse avec 5 boutons pour mesurer leur envie de fumer à la fin de la vidéo. Les patients traités par bupropion rapportent une réponse moins forte aux incitations à fumer en comparaison des patients ayant reçu le placebo. Mais le bupropion montre également chez les patients une activation réduite dans les zones du cerveau connues pour être associées à l'envie de fumer.
"Ces résultats démontrent que le traitement par bupropion est associé à une amélioration de la capacité de résister au manque et une réduction de l'activation induite dans les régions du cerveau concernées" concluent les auteurs.
Dans le second article, le Pr. Teresa Franklin, de l'Université de Pennsylvanie (Philadelphie) et coll. ont étudié les réponses du cerveau à la varénicline (Champix), un médicament de sevrage tabagique. La varénicline réduit les symptômes liés au sevrage. Les chercheurs ont étudié si ce médicament pouvait également contribuer à réduire les réponses du cerveau et l'envie de fumer lorsque les fumeurs sont exposés à des incitations au tabagisme. Ils ont utilisé l'IRMf de perfusion qui permet la mesure de l'évolution longitudinale induite dans le cerveau par un médicament lors d'une incitation à fumer et à l'état de repos. 22 fumeurs ont reçu la varénicline ou un placebo sur une durée de trois semaines. Le cerveau des fumeurs a été étudié par imagerie avant et après le traitement, «au repos» et en regardant des vidéos de 10 minutes qui comportaient des incitations à fumer.
Dans analyses effectuées avant le traitement médicamenteux, les incitations à fumer activaient les aires cérébrales impliquées dans l'addiction, comme le striatum ventral et le cortex orbitofrontal médial, et suscitaient une envie insatiable. Après le traitement médicamenteux, des modèles similaires d'activité cérébrales ont persisté chez les patients sous placebo, tandis que ceux sous varénicline présentaient une réduction de l'activité cérébrale dans ces régions cérébrales et une réduction de l'envie de fumer.
Les résultats de cette étude révèlent un nouvel effet qui contribue à l'efficacité clinique de la varénicline. "L'échec du sevrage tabagique est plus répandu chez les personnes souffrant de troubles psychiatriques, ce qui suggère qu'ils ont plus de difficulté à cesser de fumer. La varénicline et d'autres médicaments qui peuvent réduire à la fois l'envie et la réactivité cérébrale aux incitations à fumer confirment leur intérêt pour des patients plus vulnérables et susceptibles de rechute face à des incitations à fumer. "
En conclusion, ces deux médicaments permettraient de réduire et l'envie et la réaction du cerveau face aux incitations de l'environnement.