GRIPPE: Le porc, un réservoir capable de recombiner virus aviaire et humain?
C’est le Cirad, le Centre de recherche agronomique français qui émet aujourd’hui cette hypothèse, à l’issue des recherches effectuées en collaboration avec l’Institut Pasteur de Hong Kong dans les élevages d’Asie du Sud-Est et en lien avec l’école vétérinaire de Toulouse. Ces études, révèlent en effet une transmission de l’homme au porc du virus H1N1 pandémique puis une transmission entre les animaux eux-mêmes. Dans le cas du virus aviaire, le porc, par le jeu de ces transmissions, pourrait être capable de recombiner virus aviaires et virus humains pour créer une souche très adaptée à l’homme.
Car la grippe se distingue par la très grande variabilité de ses virus, dont on connaît nombre de mutations de ses deux antigènes majeurs : hémagglutinine (le H) et neuraminidase (le N). Selon les années, ces mutations peuvent être estimées mineures : c'est le glissement antigénique, qui favorise le retour chaque saison (fin d'automne) d'une formule virale ayant déjà sévi par le passé (récent ou plus ancien). Mais elles peuvent aussi aller jusqu'à un réassortiment quasi-complet (ex ci-contre, avec le virus H1N1). Le porc, déjà connu pour ses capacités à jouer le rôle de « melting-pot » de virus aviaires et humains pourrait faciliter l'émergence d'un nouveau virus. L'OMS a souvent rappelé la nécessité d'une vigilance extrême sur une éventuelle mutation du virus par la surveillance des infections de grippe chez les animaux sensibles, dont le porc. Si la plupart des virus de la grippe touchent et circulent « entre mammifères», la transmission croisée entre espèces est déjà connue. Chez les porcs, aussi, sont «sensibles» aux infections de la grippe humaine, aviaire et porcine. Comme les virus grippaux ont huit gènes parfaitement segmentés, le porc peut fonctionner comme un véritable « réservoir » de virus grippaux favorisant l'échange de matériel génétique et donc la mutation du virus. Ainsi, une partie de la population porcine serait atteinte à l'échelle mondiale par des virus grippaux, transmis par contact direct et indirect par voie aérienne par des animaux malades ou porteurs sains. Véritable réservoir de ces virus, le porc pourrait surtout recombiner plusieurs types de virus. Comme l'explique François Roger, Directeur de l'Unité de Recherche AGIRs au Cirad : « c'est un événement rare mais toujours possible, le porc peut recombiner des virus aviaires et humains pour créer une souche très adaptée à l'homme. L'Asie du Sud-Est où se côtoient, avec de fortes densités, humains, porcs et volailles constitue un terrain favorable à cette émergence».
Le porc, réservoir de plusieurs virus humains : Le Cirad rappelle qu'en 2006, le virus de l'influenza aviaire H5N1, parti d'Asie du sud-est en 2003, était détecté en Afrique tandis que le nouveau virus H1N1, ou virus de la « grippe porcine », se répandait en 2009 à partir du Mexique dans les zones tempérées et déclenchait de sévères infections grippales chez l'homme. Grâce à son dispositif Grease, mis en place dès 2007, et des travaux de recherche au Vietnam sur le rôle épidémiologique du porc, les chercheurs du Cirad confirment en effet une transmission de l'homme au porc du virus H1N1 puis une transmission entre les animaux eux-mêmes. D'autres travaux, en cours avec l'Institut Pasteur à Phnom Penh, montrent que des virus d'origine humaine sont détectés dans des élevages de porcs au Cambodge.
Une nouvelle étude en collaboration avec l'Université de Hong Kong débute actuellement sur des élevages situés au Vietnam et au Laos afin d'améliorer la détection chez le porc de nouvelles souches potentiellement pandémiques.
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