NEURO: Mais combien d'odeurs sommes-nous capables de percevoir ?
10.000, 1 milliard ou jusqu’à mille milliards d’odeurs différentes différenciables par l’odorat humain ? La question est reposée par cette étude critique de l’Arizona State University, présentée dans la revue eLife, qui contredit point par point les précédentes estimations. Les auteurs appellent avant tout à mieux comprendre l’organisation de la perception olfactive dans le cerveau.
Rick Gerkin, de l'Arizona State et auteur principal, s'inscrit ici ainsi en faux, contre une précédente étude, publiée dans la revue Science qui évaluait notre capacité olfactive à mille milliards de stimuli olfactifs différenciables par le nez humain. Une erreur selon R. Gerkin déjà officialisée dans les manuels de neurosciences : « l'affirmation selon laquelle les humains peuvent faire la différence entre au moins mille milliards d'odeurs est basée sur un modèle mathématique fragile car de toutes petites variations dans les données de départ peuvent entraîner des différences de plusieurs zéros dans l'estimation (Voir schéma ci-contre). Les hypothèses sur la perception de l'odeur ne sont pas validées », souligne l'auteur.
Rappelons la méthodologie de cette étude de la Rockefeller University (New York), publiée dans Science. Les chercheurs avaient élaboré des mélanges de 10, 20 ou 30 molécules, choisies parmi 128 molécules odorantes représentant un large éventail d'odeurs ; puis avaient demandé aux participants de trouver l'intrus, parmi 3 flacons, 2 contenant le même effluve, le dernier un parfum légèrement différent. L'expérience montrait que lorsque la composition varie de plus de 50%, les participants parviennent à identifier correctement l'intrus. En rapprochant ce ratio du nombre de combinaisons possible, l'équipe aboutit à une moyenne de mille milliards d'odeurs différenciables, ce qui est analysé comme un maximum.
Et si la méthodo était différente? Ici, les chercheurs montrent que si l'expérience avait porté sur 100 participants supplémentaires, le même modèle statistique aurait « démontré » que le nez humain est capable de différencier toutes les odeurs possibles. Bref, c'est une démonstration en règle qui nous est proposée de la variabilité des résultats possibles en fonction de chaque critère pris en compte dans le modèle.
Autre argument, il n'existe pas de classification universelle des odeurs, au contraire des couleurs par exemple. Il reste, avant de proposer ce type d'estimations, à acquérir une compréhension plus profonde de l'olfaction et du processus de la perception olfactive. Une mise au point donc entre spécialistes, dans le cadre des recherches poursuivies par l'équipe sur l'organisation de la perception olfactive, l'apprentissage et le comportement dans le cerveau. Car reconnaître et différencier une odeur pose aussi la question de la mémoire des odeurs?
Source: eLife July 7, 2015 DOI: 10.7554/eLife.08127.001 The number of olfactory stimuli that humans can discriminate is still unknown (Visuel@Andy DeLisle)
Lire aussi : NEURO: Et si l'odorat restait le sens humain le plus développé? –
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