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Ces CANCERS qui ne s’attaquent qu’aux jeunes femmes

Actualité publiée il y a 6 années 1 mois 3 jours
The Journal of Pathology
Les cancers ovariens et pancréatiques rares chez les jeunes femmes sont causés par des cellules qui se sont installées dans un organe autre que celui pour lequel elles avaient été conçues lors de l'embryogenèse

Pourquoi certains cancers n'affectent que les femmes jeunes ? Les scientifiques de l’UNIGE et des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) montrent que les cancers ovariens et pancréatiques rares chez les jeunes femmes sont causés par des cellules qui se sont installées dans un organe autre que celui pour lequel elles avaient été conçues lors de l'embryogenèse. Ce décryptage d’une migration de cellules germinales primordiales dans l'embryon humain ne changera pas le traitement chirurgical de ces patientes, mais amène à réfléchir aux protocoles de chimiothérapie et à tendre vers une oncologie mieux personnalisée.

 

Les tumeurs mucineuses – cancer dans lequel les cellules de la tumeur produisent du mucus- de l'ovaire et du pancréas touchent les femmes jeunes, âgées de 30 à 40 ans. Ces tumeurs prennent la forme d'un gros kyste, une sorte de boule remplie de liquide. Elles représentent environ 3% des cancers de l'ovaire et du pancréas et sont généralement traités chirurgicalement. Pris à temps, le kyste cancéreux est complètement enlevé. Cependant, dans 15% des cas, le kyste se brise avant la chirurgie ; les cellules cancéreuses se propagent donnant naissance à des métastases hautement résistantes à la chimiothérapie. Dans ce cas, le pronostic de survie des patients ne dépasse généralement pas un an.

 

Mais quel lien entre l'ovaire et le pancréas ? Pourquoi un cancer non gynécologique est-il presque exclusivement féminin ?  En effet, parmi plusieurs formes de cancer du pancréas, l’une d’elles touche spécifiquement les femmes et souvent les femmes jeunes. Comment est-ce possible, même si le pancréas est un organe peu exposé aux hormones sexuelles ? Ce cancer du pancréas, appelé « kyste mucineux », présente des similitudes étranges avec un autre cancer mucineux touchant les ovaires. Par analyses à grande échelle de données génomiques, des chercheurs de Genève en collaboration avec des collègues des États-Unis, apportent une première réponse : ces 2 tumeurs sont issues des cellules germinales embryonnaires. Bien que non différenciées, ces cellules migrent vers les organes reproducteurs. « Ce n’est que pendant l’embryogenèse que ces organes sont vraiment proches », explique l’auteur principal, le Dr Labidi-Galy : Au tout début de la grossesse, l’embryon possède des cellules germinales primordiales, en quelque sorte des précurseurs des gamètes, des ovocytes ou des spermatozoïdes, qui, entre 4 et 6 semaines de grossesse entreprennent une longue migration dans le corps humain. Elles passent derrière le futur pancréas et arrivent aux environs des gonades, vers la 7e semaine de grossesse.

 

Le profil transcriptomique des tumeurs mucineuses est très proche de celui des cellules germinales primordiales : l’équipe développe ici un profil transcriptomique qui définit les niveaux d'expression des gènes de cellules germinales primordiales à l'âge de 6 ans. 7, 11, 16 et 17 semaines de grossesse, ainsi que des cellules ovariennes et pancréatiques saines et tumorales. Les chercheurs comparent ces données, d’une part pour pancréas et, d’autre part l’ovaire, en regardant, pour chacun de ces deux organes le profil des tissus sains, des tumeurs mucineuses et d’autres types de tumeurs. Les résultats de l’analyse sont clairs : dans les deux cas, le profil transcriptomique de la tumeur mucineuse est loin du tissu d'origine supposé (ovaire ou pancréas), mais très proche des cellules germinales primordiales. Cela suggère que ces tumeurs sont plus proches des cellules germinales primordiales que de l'organe dans lequel elles se sont développées.

 

L’hypothèse est que certaines de ces cellules germinales s’arrêtent en chemin, et par erreur dans d’autres organes, entraînant un risque de tumeur pouvant survenir jusqu’à 30 ans plus tard. Nous avons découvert les mêmes mutations génétiques, les mêmes types de victimes - jeunes femmes, souvent fumeuses - et, ce qui est encore plus surprenant, du tissu ovarien dans les kystes pancréatiques, soulignent les chercheurs. Ces observations cliniques indiquent qu'un arrêt de la migration cellulaire survenu accidentellement au cours de la vie embryonnaire de ces femmes pourrait, des décennies plus tard, être exprimé par un cancer, et cela en fonction d’autres facteurs de risque (comme le tabagisme) et également en fonction du lieu où ces cellules germinales primordiales se sont installées.

 

Des résultats qui ne vont pas modifier le traitement chirurgical de ces tumeurs, mais font réfléchir à des protocoles de chimiothérapie mieux ciblés.


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